Protéger contre quoi ? Prescriptions musicales et jouissance lyrique au sein de l’église catholique
L’utilisation du chant et de la musique a, assez étonnamment, fait l’objet de réglementations très strictes – voire d’interdictions – au sein des trois religions monothéistes. En choisissant d’étudier l’introduction du castrat, puis son éviction, au sein du dispositif religieux catholique à partir du XVIe jusqu’au XXe siècle, l’auteur de cet article propose d’interroger et de cerner ce contre quoi est censée nous protéger la stricte réglementation, voire l’interdiction, de certaines pratiques musicales et vocales. Que nous révèle, in fine, cette incroyable aventure artistico-religieuse à l’occasion de laquelle on mutila des milliers d’enfants au nom d’une nécessité de faire entendre la voix des anges et de transmettre le message divin depuis une position hors-sexe ? Elle se révèle être le témoin de la violente tension entre la nécessaire jouissance lyrique qui habite tout dispositif de transmission de la parole de Dieu et sa mise à distance qui hanta durant près de deux mille ans la pratique vocale catholique. Cette petite histoire des prescriptions, injonctions et ordres concernant la pratique musicale au sein de l’Église catholique permet de rappeler que le fanatisme et les violences qui lui sont liées est la chose la mieux partagée par les religions dès que la littéralité de la transmission de la parole divine et son cortège de certitudes et d’injonctions surmoïques devient le seul enjeu de la situation religieuse.
Mots-clés
- Castration
- Interdits religieux
- Musique sacrée
- Opéra
- Voix